Itinéraire d’un sumo en devenir
Le titre de ce documentaire laisse présager le pire ; l’injonction est sans appel. Takuya est lycéen, il pratique le judo, mais son père en a décidé autrement : il sera sumo. La cinéaste Jill Coulon s’empare de cette histoire et livre un témoignage singulier. Elle s’immisce dans le quotidien de l’adolescent et de sa famille, et le filme dans son aventure sumotori. Pas d’interviews, pas de connivence, le documentaire est brut.
Pendant une heure et demie, on est immergé dans un Japon que l’on ne connait pas, ou peu, strictement masculin, aux codes séculaires, incompréhensibles, ésotériques. Takuya s’adonne à cet art du sumo, avec conviction, et devient un lutteur. Parfois, il se pose des questions. Le poids de la tradition pèse souvent dans la balance, mais aussi sur ses épaules. Ne pas décevoir, suivre les règles, vivre une vie qui n’est pas la sienne, Takuya si applique. Parfois il y croit, mais quand le doute s’installe, le destin bascule. Et si le Japon reste un pays lointain et mystérieux, on se surprend à être concerné par ce jeune homme face aux rites, à la tradition, au sens de la vie. On découvre les coulisses de la vie de sumo, une vie oisive, parfois vide, rythmée de repas et d’entraînements.
Une vie bien remplie, mais difficile à appréhender de ce côté-ci du globe. Le sumo, sa vie, son œuvre reste et restera une énigme pour tout européen normalement constitué. La vacuité est pesante, les cours d’éducation sexuelle sont embarrassants et les répétitions de réponses aux médias laissent perplexes. Un sumo se doit d’être de son temps. Ce fier combattant représente le pays le plus moderne du monde, contrarié par des us et coutumes d’un autre siècle, emprisonné d’un héritage suranné, étouffé sous une chape de croyances obsolètes, et qui se meurt peu à peu.
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PS : La musique de ce documentaire a été réalisée par JB Hanak, moitié du groupe dDamage.