Boulbi connection,
beats répétitions
Tout est calculé, imbriqué, corrélé. L’histoire ne date pas d’hier, elle commence fin des années 90, peu avant l’an deux mille. Roro fréquente des types qui fréquentent un petit restaurant turc, rue du faubourg du temple. C’est probablement là que l’on se croise pour la première fois. Quelques années plus tard, on me parle de B.A.R.G.E, de son album, de « Romain qui fait des beats ». La prochaine étape sera Twitter, réseau social discret, mais où les dossiers ressurgissent.
@Roro_one1, utilisateur compulsif de la brève en 140 signes, étaye son réseau, étend son horizon, il connecte avec ceux du restaurant turc, mais aussi avec tout une clique de passionnés de rap, de projets, d’underground, de musique… Chacun de leur côté, ils fomentent et conspirent, c’est comme ça que Charles Pasqua Money, un projet musical, et participatif, à base de beats lourds, voit le jour. Roro pour la musique, et tout un tas d’arobases pour le graphisme, le mixage, les connections outre-Atlantique, la communication et les RT.
En voici un peu plus sur Roro, et le projet Charles Pasqua Money, des révélations, de la conspiration, du son inédit, des spoilers, et #CharlesPasquaMoney2 en 320KPBS pour les Internet, en cette fin d’année. Toujours gratuit, avec plus d’invités ; sont confirmés : Hype, Sazamyzy, Seno, Khalif Da Menace, B.A.R.G.E, DAM16… La confédération anti-reptilienne est organisée, enfin, Twitter dénichera et démasquera les derniers serpents du réseau, les beats de Roro feront le reste.
* Comment tu découvres le rap et qu’est-ce qui te motivera à faire des beats ?
J’ai découvert le rap en 1993 / 1994. J’ai pas vraiment de souvenirs précis mais comme tout le monde j’écoutais IAM parce qu’ils avaient fait le single Le Mia et qu’ils étaient marseillais. Tout le monde les trouvait sympas avec leur accent. Mais j’écoutais ça comme j’écoutais ce que mon père mettait dans la voiture. J’ai vraiment accroché sur le rap en 1997, je m’étais fracturé l’avant bras, et étant en sport-étude, j’étais dispensé de sport. Ça me laissait de grands temps libres chez moi. Du coup, j’empruntais des CD à droite à gauche et je me les copiais sur K7.
J’ai accroché sur Liquid Sword de GZA parce que je trouvais la pochette magnifique, et E. 1999 Eternal de Bone Thugs pour la même raison. Ça a été un traumatisme ! J’écoutais un peu le « Rap Français » de l’époque Time Bomb, Oxmo, Gyneco, Ntm, mais sans plus, j’écoutais peu de musique. Mais ces deux disques-là m’ont mis d’accord. Depuis j’écoute vraiment beaucoup de rap, et j’écoute aussi plein d’autres choses.
Pour les beats, ça a commencé un peu plus tard. A l’été 1999, je suis allé passer 10 jours chez un oncle, il a toujours été très porté sur l’informatique et les machines associées en tout genre. Et il aime beaucoup la musique électronique. Bref, j’arrive chez lui et un après-midi il me montre son matériel, il avait un combo boite à rythme, échantillonneur, carte son, avec un logiciel de pistes séparées genre Cubase…
C’était révolutionnaire d’avoir ça, ça m’avait choqué. On passait nos après-midi à faire des sons bizarres, des mélanges d’électro, de bruits samplés, etc. C’est là, que j’ai commencé à bidouiller. Ensuite, j’ai eu mon premier ordinateur en 2001/2002, et j’ai commencé à m’équiper pour faire du son.
À cette époque, je suis à Boulogne-Billancourt, je fais passer quelques sons à LIM, il accroche sur quelques uns, et surtout il m’a vraiment donné tous les conseils pour en faire, et le faire bien ! On passait des nuits blanches dans un apart’ à Saint-Denis chez DJ Bagdad à préparer des sons, sampler, pour ses mixtapes Violences Urbaines.
De là, j’ai su comment bosser un projet de A à Z au niveau créatif. LIM m’a amené partout, et il m’a tout montré : comment faire un son, le choisir, comment composer, comment faire une prise de voix, comment ça se passe dans un home studio, dans un studio moyen, dans les gros studios, dans les radios… De là j’ai vraiment commencer à sortir des sons, à faire ce que je voulais, et à m’en donner les moyens. C’est con à dire, mais j’ai surtout appris à être créatif et patient en apprenant à faire des instrumentaux.
* Quel matériel tu utilises ?
Je travaille avec un PC, Acid Pro 6.0, un Korg R3 vocodeur, un Korg Micro X, une MC303, une MPC2000XL et beaucoup de samples. J’échantillonne beaucoup, et pour les compositions, je suis un très mauvais joueur de piano, donc je demande souvent à Sam Majesté, de Cash Converterz, qui connaît un peu plus le solfège, de m’aider ou de me jouer des trucs en midi, que je puisse utiliser.
* Avec qui tu es connecté actuellement musicalement ? J’ai entendu dire que tu étais connecté avec le rappeur B.A.R.G.E, qui a sorti un album plutôt confidentiel, mais vraiment pas mal…
Au niveau de l’équipe, je fais partie avec Sazamyzy, Hype, Madizm et Damencio de Haute Couture Musicale. En 2009, j’avais décidé de totalement laisser tomber la production d’instrumentaux, j’étais fatigué par le milieu du rap si on peut dire ça comme ça, et peu inspiré, même si des potes comme B.A.R.G.E ou Dam16 me relançaient tout le temps. J’étais lassé.
J’avais laissé des sons à Saza en 2008 / 2009 je crois, il préparait à l’époque l’album Braquage en YZ. Et en 2010, alors qu’il venait de sortir Braquage en YZ, il me contacte par rapport à un son qu’il avait beaucoup accroché et qu’il voulait pour un projet qu’il préparait, il avait besoin des pistes séparées. De là, je lui ai envoyé quelques nouveaux sons, lui m’a envoyé un extrait de Grand Banditisme Paris. J’étais choqué. Il avait tout un concept, une manière inédite de faire des morceaux ici, ça a créé une véritable émulation. J’ai commencé à enchaîner les sons, lui écoutait, donnait des nouvelles directives : « Il faut une caisse comme ça, un temps sans pied ici, un effet là… ». Un vrai perfectionniste.
Ça a donné un morceau que beaucoup reconnaissent comme classique États-Unis d’Afrique, avec Shone, dont j’ai produit la seconde moitié, et Haute Couture Musicale 2 avec Zesau, que j’ai produit entièrement. De là, Saza m’a proposé de le rejoindre avec Hype et Madizm pour préparer d’autres volets de Grand Banditisme Paris, et faire mes projets. J’ai accepté parce que cette façon de faire, cette créativité et la liberté qu’il y a dans ces projets, c’est ma came. On va aller loin, on va sortir des projets fous, et surtout nous ne sommes sectés sur rien, les gens peuvent avoir des a priori mais notre délire est grave ouvert. Les plus sceptiques comprendront avec le temps de toutes façons.
Les volumes 2 & 3 de Grand Banditisme arrivent, et je pense qu’on va, peu à peu, ouvrir une nouvelle porte, une nouvelle façon de faire du rap en France. La façon de faire est nouvelle, totalement décomplexée, donc le produit va être senti comme nouveau. Que ce soit dans la façon de travailler, d’inviter les gens, le choix des sons, des clips, les textes, les visuels, la façon de marketer le projet… Rien n’est fait comme le font les autres labels indépendants, ou les autres structures. Et ceux qui écoutent du rap y sont réceptifs, ça ne laisse personne indifférent !
Pour en revenir à B.A.R.G.E, je l’ai rencontré dans les années 2000, c’était le pote d’un pote qui s’appelle Tony, d’ailleurs, B.A.R.G.E tout le monde l’appelle Tony aussi. Je le connaissais déjà de reput’, quand on l’appelait Tony Thug. Il avait un groupe avec le mec de Banlieue Sale, label de La Fouine, Green. Ce groupe s’appelait UZI. Barge n’a pas toujours été un rappeur, il a commencé sur le tard, mais il a toujours été un gros consommateur de rap américain. Il a de la famille à Brooklyn, du coup il connaît très bien NYC. On a commencé à faire des morceaux, et une structure s’est mise en place avec son frère Jo, Buss, Loc, mon frère Sam et Relox principalement. Ça s’appelle Cash Converterz.
Le concept est simple : ramener de l’argent de l’extérieur pour l’investir dans la musique, c’est à dire matériel, séances studio, clips, etc. Entre temps Relox a monté une société qui fait des bijoux en bois, ça s’appelle WoodLife, et ça marche bien. Ils avancent bien et sereinement, quasiment sans promotion, sans aide extérieure.
B.A.R.G.E a fait un solo, Chacun son heure, et un album avec Big Twin Gambino du groupe Infamous Mobb, qui s’appelle French Queensbridge, c’est sorti sans promo, sans soutien. Actuellement, Barge prépare Ground Zéro, c’est le projet qu’il a toujours voulu faire, quand j’ai commencé à le côtoyer, il me disait déjà « Là, je fais ça, après je fais ça et ça avec le Cainri, mais le gros du truc, c’est Ground Zéro, tu verras… ». Il travaille beaucoup dessus, et il y met les moyens.
* Tu fais aussi partie de la connexion Fusils à Pompe…
Hype m’avait déjà parlé de compilations que des potes à lui faisaient. Il m’a filé les liens et j’ai téléchargé. Déjà, quand j’ai vu les visuels, je me suis demandé ce que c’était, qui étaient ces fous ?! J’ai écouté Saison de la chasse Frédéric Nihous Money. Ça m’a plu. J’ai écouté le volume 2 L’air de la campagne et le volume 3 Spécial Halloween.
De là, j’ai téléphoné à Mehdi (Hype) un soir alors qu’on jouait à la console en ligne, et je lui ai dit : » Il faut que je fasse quelque chose avec eux, je veux faire un volume spécial, un truc, quelque chose… » J’avais une partie de ces gars en liste sur Twitter, donc on a pris contact et on a ouvert un fil de discussion sur Facebook.
Pour moi, c’est une façon de travailler totalement inédite, avec des gens que je ne connais pas autrement que par ce biais. Ça a tout de suite fonctionné, et très efficacement. On lance des idées, les connections, des pistes à suivre, on se donne une deadline, et soit ça plaît, soit on corrige, soit on passe à autre chose. Charles Pasqua Money est né comme ça..
* Tu peux expliquer le concept de cette K7, Charles Pasqua Money ?
Dans nos discussions, Maith avait fait remarquer que Charles Pasqua était l’animal politique préféré de beaucoup de gens, quelqu’un qui inspire du respect, une crainte aussi, quelqu’un de secret. Il est mêlé, de près ou de loin, dans une grande majorité de tous les coups les plus tordus de la Vème République. C’est aussi quelqu’un qui a amassé de façon obscure une jolie fortune. Il a été ministre de l’intérieur, et il était dur, « Les années Pasqua » beaucoup en parlent encore. En bref, c’est un parrain avec une street-credibility plus forte que celle d’un Alley-Boy ou d’un Jim Jones !
Si on fait le bilan, c’est un voyou, riche, puissant, qui ne balance personne et qui ne va jamais en prison. C’est un peu le meilleur rappeur de tous les temps ! A partir de là, Nemanja m’a envoyé quelques extraits de discours, et j’en ai échantillonné de mon côté. J’ai fait des sons en conséquence, sans me poser de questions. Quelque part entre Charles Pasqua et la menace reptilienne. Toutes les intrus sont inédites, sauf deux qui avaient été proposées à Hype & Saza, et qui correspondaient à l’esprit du truc.
Au niveau des remixes, j’ai fait ce que je voulais. Nico m’a obtenu les vocaux de HD pour More den i hustle et celle de Lil Rue pour Google me, dont Hector De La Vallée De La Mort et le très grand Octave ‘Les internet’ Abaji ont fait le clip en dessin animé. Ce clip est magnifique. J’avais demandé les pistes de Titanic à Sidisid, et Hype m’a envoyé toutes ses prises de voix pour Grand Banditisme Paris. Après, j’ai juste fait des sons comme j’aimais, j’ai même chanté au vocoder sur La chasse aux reptiliens.
* Il y a aussi Khalif da Menace, c’est qui ? Comment il a atterri sur ce projet ?
Nico suit Khalif Da Menace, comme il a suivi A$ap Rocky, du coup je lui ai fait passer deux instrus. Il en a choisi une, il a posé chez lui, avec son pote A.M au refrain. On s’est mis d’accord pour l’utiliser conjointement sur ma K7 et sur Grand Banditisme Paris 2, Hype est allé poser sa partie en studio ici, à Paris. De là, j’ai récupérer les sessions studio de Khalif et Hype, et j’ai tout envoyé au grand magicien Madizm qui nous a mixé ça aux petits oignons ! Khalif est un rappeur qui va faire du bruit d’ici la fin de l’année. Dès qu’il aura cumulé de quoi sortir une tape, les gens vont accrocher. Il rap bien, très bien !
* Crois-tu que les reptiliens vont être sensibles à cette K7 ? Comment l’ont-ils reçue ?
Déjà, ma K7 a empêché la réélection de Sarkozy. Plus j’avançais dans la composition de ma K7, plus le visage du costume humain de Carla Bruni se distendait ; Lady Gaga a annulé des concerts, la terre a tremblé en Indonésie quatre minutes après que l’on ait mis la K7 en téléchargement libre, Kate Middleton a été vue ivre morte en soirée à Paris et a fait des doigts aux policiers, le fils de Sarko a jeté des tomates à la police… Tout ça n’arrive pas par hasard. C’est du travail, c’est une vie faite de danger, c’est la guerre.
* Combien il y a de reptiliens en France et dans le monde actuellement ? À quel moment ils sont devenus gênants ?
J’ai vu dans une vidéo très sérieuse et très crédible sur Youtube qui explique qu’ils sont partout, ils sont à notre contact, ils nous observent, se nourrissent de notre savoir et du sang de nos bébés. Ils se sont associés avec les Illuminati et ont mis un cœur de porc à la reine d’Angleterre pour qu’elle ait une vie éternelle, et qu’elle continue à vendre de l’héroïne. Ils sont devenus gênants quand Rockin’ Squat les a tous balancés, ça a été une vraie déclaration de guerre. Rockin’ Squat a foutu le monde dans une merde noir avec son morceau Illuminazi 666, on va tous mourir à cause de ce connard.
* Quel est le morceau le plus violent qui achève les reptiliens ?
La chasse aux reptiliens, car il contient des fréquences uniquement perceptibles par les serpents. Ce morceau peut aussi servir dans ta maison de campagne, ou au bled, pour chasser les couleuvres qui se sont cachées chez toi, ou les vipères qui rodent dans le jardin de tes grands-parents.
* Tu crois qu’ils sont sensibles au reggae ?
Le morceau Fight Fight Fight, je l’ai mis en accord avec le roi du Maroc pour booster la vente de shit en France. Les gens écoutent le morceaux, veulent le réécouter en fumant, ils fument, ils achètent du produit, l’économie tourne. Et nous, ça nous finance notre guerre anti-reptilienne, c’est commercial, c’est 2.0 c’est les Internet et la drogue à son maximum. Charles Pasqua peut être fier.
* Le plus farouche destructeur de reptiliens, c’est Hype ? Sazamyzi ? Charles ou Sidisid ?
Hype est le chef de la brigade anti-reptiliens, il a du sang de serpent sur les mains. Les hommes-serpents fuient sur son passage. J’ai vu un condé de la BAC perdre son costume humain sur le couplet de Hype dans Ma Drogue. Saza, lui, n’aime pas les zoulous, cette race perfide de fils de pute qui peuple le rap et la maison des secrets de TF1. Sidisid, y’a juste à écouter ses couplets pour comprendre que ce jeune est complètement dévasté, mais il est super sympa.
* Il y a aussi Hector, un personnage ambigu, il a dessiné la pochette, mais qui est-il ?
Hector a eu une vie difficile, faite de hauts, de bas, de très bas, voir de souterrains. Hector a commencé le dessin très tôt dans le métro parisien, enfin le dessin, c’était plus la manche que le dessin. Il a vivoté à droite, à gauche, il a vécu de paris sur ses défaites dans des combats de rue contre des animaux. Des gens, sans aucune pitié, l’ont fait combattre contre un chat, qui est devenu son meilleur ami, et deux poulets à deux pas du boulevard Magenta.
Ensuite, par un concours de circonstances totalement ubuesque, il a été « garçon de pute » rue St Denis, il allait chercher des sandwiches, des canettes et des doses d’héroïnes pour ces dames. Puis le mec qui vendait l’héroïne aux putes, un certain Slim Octave a.k.a Dirty Octave, lui a demandé de dessiner les pochettes de ses doses, et l’a recueilli chez lui en le nourrissant de gaufres et de fromage Comté. De fil en aiguille, il a dessiné pour d’autres gens, pour du rap… C’est la véritable histoire d’Hector de la Vallée de la Mort.
twitter • soundcloud • illustration – Hector de la Vallée